En entendant cette musique, j'entends le son des marteaux fracassant les pierres qui ont servi à bâtir notre église. Ces tailleurs de pierre, affamés, éreintés, travaillaient sous les insultes de l'architecte tout bedonnant au regard dédaigneux se prélassant dans un grand fauteuil usé, vermoulu avec une odeur de sueur répugnante. Et l'on voyait années après années cet édifice mûrir, grandir, comme on peut voir une fleur des champs s'épanouir sous un soleil printanier. On entendait au loin les charrettes qui amenaient le bois, le fouet claquait le dos des boeufs qui, à chaque pas émettaient un gémissement de douleur sans pour autant abandonner leur lourde tâche. Les scies des bûcherons chantaient à tour de rôle en déchirant le bois et l'on pouvait déjà deviner le squelette de la charpente. Les villageois contemplaient la bâtisse : « Enfin, un lieu de prière ! » s'écriait l'un, « et pourquoi faire ? » répliqua un autre. Les femmes, plus en retrait, semblaient partager la douleur des artisans.